A qui reviendra le trône d'automne ?
Ivalie vit seule dans le château d'Evergrey depuis ses neufs ans. Devenue une jeune femme, elle s'est accommodée à sa solitude. Son père est parti en guerre il y a longtemps pour ne plus jamais revenir, quant à ses domestiques, elles ont disparu ou sont décédées. Mieux vaut ne pas avoir de compagnie de toute manière, quand on est une "belle à mourir", une fille maudite, dont la vue du visage provoque une folie meurtrière. Ivy porte en permanence un masque et passe ses journées à parcourir les recoins secrets de son manoir et à s'instruire dans les livres. Un jour, une étrange créature fait irruption. Il s'appelle Le Gentilhomme, ou Puck, ou encore Robin Goodfellow. Il informe Ivy qu'un Sacre aura bientôt lieu au palais de la Reine d'été Titania, en présence des souveraines d'hiver et du printemps. Le trône d'automne, vacant depuis la disparition du Roi Gris, doit retrouver une dirigeante. Ivalie, bien qu'illégitime, est sa dernière héritière en vie, elle doit y participer. D'abord réticente, notre héroïne se voit propulsée à la cour au cœur d'épreuves cruelles, de jeux de dupes et d'alliances précaires. Mais elle découvre aussi tout ce que son isolement l'avait empêchée de voir. Le sort des Boglings, les esclaves des feys, créatures à oreilles de lapin, queues de reptiles ou cornes de bouc. La fragile survie des royaumes, déséquilibrés par le manque d'une souveraine. Les merveilles rendues possibles par l'Art, forme de magie pouvant agir sur la matière ou sur l'esprit. Le temps est compté, Ivalie doit faire ses preuves pour monter sur le trône d'Evergrey, qui lui revient de droit, et peut-être ramener un peu de justice dans les royaumes immobiles, corrompus depuis longtemps par d'incessants complots et prospérant sur l'asservissement des plus faibles. La bataille sera rude et impitoyable. Ce roman est une magnifique surprise, une féérie envoûtante aux personnages ambigüs, on a été attrapées dès les premières pages pour ne plus pouvoir en sortir avant la dernière ligne !
"Comment tu t'appelles, fiston ?"
L'uns des non moindres vertu de la lecture du beau "Le dimanche du souvenir", de Darragh McKeon est de nous rappeler que les conflits nationalistes #guerresciviles se finissent toujours, quelque soient les solutions trouvées, mais qu'en revanche, le mécanisme mortifère qui consiste à enfermer son voisin dans une identité détestée laisse au fond des coeurs des uns et des autres, des traces traumatiques indélébiles.
Simon Hanlon, architecte d'origine irlandaise, vit à New York et subit de nouveau des crises d'épilepsie après des années tranquilles. Il avait 15 ans et habitait l'Irlande du Nord quand la première crise est apparue, juste après un attentat commis par l'IRA, en novembre 87, dans sa ville natale d'Enniskillen, ou 11 personnes furent tuées et 63 grièvement blessées.
Quelques jours avant, le jeune Simon, campant sur une ile du lac de Lough Erne, avait surpris des membres de l'IRA en planque "Comment tu t'appelles, fiston ?", l'interroge l'un d'entre eux, Brendan. S'il avait parlé, il aurait peut-être évité cet attentat. Il deviendra épileptique. Avec une grand maîtrise de la construction romanesque, Darragh McKeon, bascule la deuxième partie de son roman autour du personnage de Brendan, jeune paysan aspirant à une vie simple et heureuse, et qui, révolté par l'intransigeance cruelle de Margaret Thatcher avec les grévistes de la faim républicains, finira par laisser grandir en lui la haine de l'autre. Le personnage de Brendan est vu à travers les yeux de Simon, et c'est dans ce chemin fait par "la victime" vers "le coupable" que le roman de Darragh McKeon trouve une bouleversante et necessaire universalité.