Aimons-nous les uns les autres

Catherine Clément

Seuil

  • Conseillé par
    7 octobre 2014

    Sur les barricades

    Catherine Clément est une des rares auteurs à me faire aimer l’Histoire et elle nous propose ici une vision personnelle de la période de la Commune de Paris.

    Abel Gornick, juif d’Ukraine et franc-maçon et Léo Frankel, hongrois sont tous deux installés à Paris sous l’Empire, comme orfèvres. Paris est sous le feu des Prussiens et des Versaillais gouvernés par Adolphe Thiers, surnommé Le Foutriquet.
    Les deux jeunes hommes ont des vues très différentes.

    " – J’ai toujours su que tu étais pacifiste. Tu ne supportes pas la violence, Abel. Moi, je suis du côté de l’insurrection et de la violence légitime, mon vieux. Si le peuple souffre, il se révoltera.
    - Tu ne diras point, j’ai dit à voix basse. Aimons-nous les uns les autres.
    - Qu’est ce que c’est que ces bondieuseries? a dit Léo, fâché. Tu cites les lois de Moïse maintenant?
    - Je vois que tu t’en souviens.
    - Mais je me fous de Moïse et de sa religion! Je me fous de Jésus et de son commandement, aimez-vous les uns les autres, et quoi encore?
    - Ce n’est pas "aimez-vous", c’est "aimons-nous", j’ai dit très calmement. Et c’est la devise brodée sur la bannière de ma loge. Pas un ordre tombé du ciel, mais un mot d’ordre lancé à toute l’humanité.
    - Très touchant, a ricané Léo. Quand les canons prussiens viendront nous bombarder, je te la ressortirai, celle-là. Sois pacifiste, mon vieux! Les pacifistes ont toujours tort."

    Aussi, Léo deviendra élu délégué du XIIIe sur la liste de l’Internationale et ministre du Travail et Abel se contentera d’aider tout le monde en commençant par son ami Léo qu’il aime tant.

    Catherine Clément nous entraîne en pleine révolte contre les Versaillais avec Napoléon La Cécilia, un militaire ami de Garibaldi, avec la belle et jeune russe Lisa Dmitrieff, une protégée de Karl Marx. Nous montons sur les barricades avec les femmes, Saubade, une jeune nonne, Madame Jules, Lisa et Louise Michel. Abel assure le repli, en premier de sa belle et tendre Sophie Gold mais aussi de Léo et Lisa.

    Après la répression de La Commune par les Versaillais, chacun a quitté Paris : Louise Michel au bagne, Lisa en Russie, les autres en Angleterre puis en Egypte et à Bakou.
    " La bataille ne s’arrêterait pas entre la minorité qui accapare – c’était Le Foutriquet et ses sbires- et la majorité qui produit – c’était nous."
    Catherine Clément éclaire une partie de l'Histoire de Paris avec la participation de certains personnages réels dont Abel Gornick, son arrière-grand-père et d'autres fictifs comme Yvonne Jules, Sophie Gold ou la nonne. Avec son érudition et son talent littéraire, elle nous entraîne une fois de plus dans la grande Histoire avec une version alerte et agréable.
    Le naturel, le ton et le regard d'Abel m'ont toutefois laissé un peu en spectateur de cette période mouvementée. J'aurais aimé en savoir plus sur les forces en présence, sur la participation de Louise Michel, sur la famille de Marx, le rôle de Victor Hugo ou de Clemenceau. Mais ce sera pour un autre roman.